Umberto Eco est tout sauf n'importe qui. Certains ne connaissent de lui que le Nom de la rose, un formidable roman policier se déroulant dans une abbaye du Moyen-Âge, véritable ode à la culture antique. Et pourtant, outre qu'il est un lecteur insatiable, Umberto Eco est aussi un observateur aiguisé de son époque et des us et coutumes de cette dernière. Dans un article publié traduit de l'italien par Robert Maggiori, le grand auteur italien s'intéresse à Vista, nouvelle étape dans la civilisation. "Si vous voulez une machine mise à jour, de proportions raisonnables, vous devrez vous taper Vista", écrit-il, "Ou alors vous rabattre sur un clone grand comme camion remorque, assemblé par un revendeur plein de bonne volonté qui installe encore Windows XP ou les versions antérieures". Pour Eco, "les constructeurs d’ordinateurs se sont aperçus que les ventes diminuent sensiblement parce que l’usager, pour ne pas avoir Vista, renonce à rénover son matériel". Solution : le "downgroading" ou la possibilité de faire marche arrière, c'est-à-dire passer un ordinateur de Vista à XP. "Autrement dit, on nous donne la possibilité, moyennant un certain travail et une certaine somme, d’avilir et de dégrader quelque chose qu’on avait payé une certaine somme pour avoir". Et d'ajouter ce bel exemple : "c’est comme acheter une Ferrari à un prix très élevé, et ensuite payer afin que le mécanicien la réduise aux prestations d’une 2 CV". Paradoxe, évidemment ! "Quand arrivera-t-on au stade où, pour une somme raisonnable, leur ordinateur sera changé en cahier, avec un encrier, et un stylo à plume Perry ?". "Le progrès peut aussi signifier faire deux pas en arrière, comme revenir à l’énergie éolienne au lieu du pétrole et des choses de ce genre. Soyez tendus vers le futur ! En arrière toute !" Pour une fois, la première ?, l'humanité progresse à reculons.